Un bâtiment au cœur du
18e siècle yverdonnois
Au 18e siècle, dit siècle des Lumières, la ville d’Yverdon compte quelques 2500 habitants ; elle est prospère et connaît un rayonnement économique et intellectuel qui dépasse les frontières régionales.
Les bains accueillent une riche clientèle suisse et étrangère depuis 1730, l’encyclopédiste Fortuné Barthélémy de Félice s’installe à Yverdon et y édite sa fameuse encyclopédie, Rousseau y réside durant quelques semaines en 1762. D’autres encore, tels les commerçants Mandrot, le géologue Elie Bertrand ou le général Haldimand contribuent à faire connaître la petite bourgade du bout du lac de Neuchâtel.
Les bâtiments publics et privés qui entourent la place ont subi une importante refonte architecturale dans la 2e moitié du 18e siècle. Le temple, l’hôtel de ville et le logis de l’Aigle royal sont construits entre 1757 et 1776, selon les canons architecturaux de l’époque. Le 27 novembre 1773, les autorités ont pour la première fois siégé dans le nouvel hôtel de ville.
Entièrement bâtie en pierres jaunes de Neuchâtel, la façade monumentale de l’hôtel de ville donnant sur la place s’inspire de l’architecture classique parisienne. Elle présente un avant-corps central rythmé par des pilastres et surmonté d’un fronton triangulaire portant la date de conception du bâtiment. L’élégance de cette façade qui s’intègre parfaitement à l’ensemble des bâtiments l’entourant confère à la place une dimension spectaculaire.
Les réflexions autour de la nouvelle maison communale débutent en 1765 lorsque les autorités mandatent les deux architectes Abraham Burnand et Béat de Hennezel pour élaborer « des plans pour la construction d’un nouvel hôtel de ville et d’un cabaret contigu » à l’emplacement de l’ancienne maison de ville du 16e siècle et du cabaret. L’objectif des autorités est de faire construire un hôtel de ville dans l’air du temps qui suit les principes de l’architecture classique, permettant ainsi aux autorités communales de s’affirmer face au souverain bernois qui loge dans le château depuis 1536. Dès l’origine, le bâtiment est conçu pour abriter plusieurs fonctions : économique au rez-de-chaussée, politique et administrative au bel étage, polyvalente au second.
Entre permanence et mutations
Bien que l’administration ne soit plus depuis longtemps contenue dans ce seul bâtiment, la principale vocation de celui-ci est toujours d’abriter une partie de ses bureaux et de ceux des autorités, dont celui du syndic. La Municipalité (exécutif communal) y tient toujours ses séances dans une salle dédiée, alors que le Conseil communal (législatif) n’a déménagé que récemment. Si en 250 ans la plupart des pièces de l’hôtel de ville ont changé d’usage, celle qui abrite les archives l’a conservé sans interruption.
Dans l’ensemble, cet édifice n’a connu que très peu de remaniements au cours des siècles. L’extérieur et l’aménagement intérieur sont quasiment intacts, à l’exception du remplacement de boiseries, notamment celles de la salle des débats en 1969. Certains usages ont été intervertis ou ont disparu, tels que la fonction commerciale du rez-de-chaussée ou les logements.
Cette permanence s’explique par le fait que l’extension des services communaux a pu se faire dans l’ancien logis. Si au 18e siècle, seul le secrétaire avait un bureau à l’hôtel de ville, le bâtiment et son annexe du logis accueillent aujourd’hui plusieurs services de l’administration.