À titre liminaire, la Municipalité tient à rappeler qu’elle est très attachée à la liberté d’expression et à la séparation des pouvoirs, fondements de notre ordre démocratique. Toutefois, la liberté d’expression n’est pas la liberté de dire n’importe quoi. Constatant qu’un certain nombre d’allégations et d’amalgames sont propagés, via les réseaux sociaux, sur la situation sécuritaire, la présence de marginaux, de toxicomanes et de dealers au centre-ville, elle tient à apporter les éléments d’information suivants : 

  • Face à la présence de dealers, la Ville et Police Nord vaudois (PNV) agissent avec détermination aujourd’hui comme hier. La Ville et l'autorité agissent dans le cadre de l'état de droit : quelles que soient les circonstances, elles doivent toujours se conformer au droit et aux règles et notamment au respect des droits fondamentaux des personnes. Toutes les villes, dans le canton, en Suisse, et ailleurs dans le monde, font face à cette problématique, et accuser Yverdon-les-Bains d’un laxisme particulier démontre une ignorance crasse de la complexité des politiques publiques à mettre en œuvre pour endiguer le commerce et la consommation de drogues. Les réseaux mafieux qui approvisionnent le marché sont internationaux. Inlassablement les polices travaillent, la nôtre comme les autres, à leur identification et à leur démantèlement, en collaboration avec les autorités pénales. Mais l’ampleur des profits générés par ce trafic tout comme la demande des consommateurs apparentent ces efforts au travail de Sisyphe.
  • Selon l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), « l'objectif de la politique suisse en matière de drogue est de minimiser la consommation de drogues et ses conséquences négatives. À cette fin, elle repose sur les quatre piliers que sont la prévention, la thérapie, la réduction des risques et la répression. »
  • À l’échelle yverdonnoise, la mise en place de cette politique des quatre piliers se traduit de la manière suivante : en matière de réduction des risques, Zone bleue prend en charge les toxicomanes ; en matière de prévention, le Service Jeunesse et cohésion sociale (JECOS) prend en charge les mesures de prévention, notamment auprès des jeunes, par un travail de proximité dans les quartiers. La répression est du ressort de PNV, en collaboration avec la Police cantonale, et les autorités judiciaires. Le pilier thérapeutique est en mains cantonales.
  • Le deal à proximité de la Gare existe depuis de nombreuses décennies, hélas. Notre ville est très bien connectée, tant du point de vue routier que ferroviaire. De plus, la Gare jouxte un grand espace largement inoccupé, la Place d’Armes, qu’il est difficile de surveiller et d’occuper en permanence. Cela n’a pas échappé aux dealers et aux consommatrices et consommateurs, qui ne sont de loin pas tous yverdonnois. Le deal à proximité d’une gare n’est pas un phénomène yverdonnois, c’est souvent le cas dans d’autres villes.
  • Le JECOS a aussi pour mission d’accompagner les personnes en situation de marginalité et les personnes précaires. Avec l’objectif d’aller vers ce public, le kiosque rouge de la Place d’Armes, rebaptisé Kipole, a été ouvert dans le cadre d’un projet pilote en mai 2023 et est géré par des travailleuses et travailleurs sociaux.
  • Ces dernières semaines, il y a eu une sorte de mélange des gens, une superposition des problèmes. Zone bleue a temporairement fermé à la suite de fortes tensions entre usagères et usagers, et de problèmes de sécurité pour le personnel. Ceci a eu pour conséquences que les toxicomanes se sont rapprochés de Kipole. Les dealers de leur côté ont augmenté leur offre et leur présence au centre-ville. Le marché du crack est en plein essor, le prix des boulettes est bon marché : cette situation attire les consommatrices et consommateurs, loin à la ronde, et génère des vols et de la prostitution afin de pouvoir se payer une nouvelle dose de cette drogue très addictive, qui rend également ses consommatrices et consommateurs plus agressifs (notamment en termes de mendicité intrusive).  
  • Face à cette détérioration de la situation, d’aucuns insinuent que la Municipalité et PNV seraient restés les bras ballants, seraient complaisants ou même complices, ou qu’il conviendrait d’agir avec des milices privées. La Municipalité estime que ces allégations sont irresponsables, et dénonce l’exploitation populiste qui en est faite.
  • Depuis plusieurs semaines, les services de la Ville, tout particulièrement le JECOS et PNV ont pris toutes sortes de mesures pour endiguer cette situation. PNV concentre ses effectifs et ses interventions au centre-ville, afin de rassurer la population, et déranger les activités des dealers, et de les arrêter. Des périmètres d’interdiction ont été mis en place, même si jusqu’ici les résultats ont été peu probants. Il convient aussi de préciser – une fois encore – que les effectifs dédiés à ces tâches d’intervention ne sont pas les mêmes que ceux dédiés au contrôle du stationnement et à la répression de la délinquance routière. Que cela soit clair pour toutes et tous : la police ne préfère pas mettre des amendes plutôt que de s’occuper des dealers, comme on l’entend trop souvent. Avec des équipes distinctes, elle accomplit ses deux missions, parmi d’autres comme la sécurité de la population lors des matchs de foot perturbés par les hooligans.
  • De son côté, le JECOS a élargi les horaires d’ouverture de Kipole, en déplaçant des travailleuses et travailleurs sociaux des quartiers au centre-ville, afin d’assurer la prise en charge des marginaux et des personnes précaires. Une délimitation par barrière a été mise en place durant l’été autour de la Kipole, afin de délimiter tant que possible l’espace dévolu à ses publics et de favoriser un passage serein des passant·es autour de cette zone. La structure Zone bleue est rouverte, dans un cadre lui aussi plus sécurisé. 
  • La Municipalité a également entrepris différentes démarches auprès du Canton et en concertation avec d’autres villes connaissant la même situation, afin de coordonner la riposte policière, judiciaire et de santé publique.

Tout en partageant l’exaspération et l’inquiétude de la population et des commerçant·es face aux dealers, la Municipalité souligne que l’éradication pure et simple du deal de rue, le déplacement en périphérie des villes des toxicomanes, ne sont pas des options réalistes, car derrière le deal et la violence qu’il engendre, il y a des consommatrices et des consommateurs, une grande misère sociale et sanitaire, qu’il s’agit de regarder en face. Pour réduire le deal et ses nuisances, il faut un nouveau cadre législatif fédéral, plus répressif à l’égard des dealers, il faut plus de moyens pour la police et la justice afin qu’elles puissent faire leur travail : arrêter les dealers et devoir les relâcher quelques heures après n’a pas de sens. Et il faut une politique sanitaire de prise en charge des toxicomanes, voire des locaux de consommation sécurisés, ou une légalisation partielle de la vente de stupéfiants, comme Lausanne le teste actuellement. Tout cela est plus compliqué à mettre en œuvre, et à financer, que des injonctions au ton comminatoire.

La Municipalité appelle le Canton et la Confédération à augmenter les moyens à disposition pour renforcer la politique des quatre piliers, face à l’augmentation des problèmes de dépendance (y compris alcoolique) et de consommation festive de drogues.

Pour conclure, face à ces tâches titanesques, la Municipalité souhaite assurer la population qu’elle agit avec détermination. Elle entend également faire respecter le travail et l’intégrité des collaboratrices et collaborateurs de PNV, de ses services et de l’association Zone bleue qui, chaque jour, s’engagent sur le terrain pour gérer et maîtriser la situation complexe. Il s’agit de personnes dévouées et intègres, qui méritent la reconnaissance publique, et pas des mises au pilori gratuites de protagonistes en mal de publicité.

Publié le par :

Communiqué de presse

Newsletter
Le lien a été copié !

Vous ne trouvez pas ce que vous recherchez ?